« Ma Laisse », de François Prunier

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François PrunierCe court roman est écrit par François Prunier, à la troisième personne du singulier, au passé, dans un style alerte et simple qui nous fait entendre la voix d’un narrateur déjanté, un doux dingue hanté par la nécessité d’être tenu en laisse par une femme.

Il a déjà une expérience conséquente des pratiques sadomasochistes qu’il nous livre par bribes, au gré de son monologue joyeux et délirant, un brin amer et encore un peu révolté. Nous découvrons ainsi les donjons parisiens, mais aussi des jeux d’apparence plus innocente à la surface de la vie de tous les jours.

Notre homme est un employé de bureau, un père de famille et un écrivain. Il nous parle très librement de son quotidien et nous rapporte mille anecdotes croustillantes sur de multiples figures littéraires très célèbres (Colette…) ou injustement oubliées (Rachilde…).

Il a lu Freud et il a même fait sa psychanalyse. Il sait d’où il vient, mais il n’arrivera cependant pas à échapper à son destin. L’histoire se terminera mal

Ce bref récit se lit facilement. Il est à la fois amusant, touchant et instructif. C’est surtout un OVNI littéraire, qui tient à la fois du journal intime et de la critique sociale. L’auteur avait déjà porté un premier regard très décapé, juste et profondément humain sur ce thème, avec son roman Martin Roi (Stock et Le Livre de Poche), rédigé dans une forme beaucoup plus classique.

Ma laisse n’est pas une redite : le ton, le personnage, l’époque et le contexte ne sont plus les mêmes.

 

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Le maître de l’unicorne, un roman de Thierry Chambolle

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Thierry Chambolle publie ces jours-ci le Maître de l’unicorne aux éditions les Indes savantes.


Le Maître de l’Unicorne est un roman historique : que raconte-t-il ?

En 1514, le sultan de Cambaye, l’actuel Gujarat, donne un rhinocéros à Albuquerque, le gouverneur ds Indes portugaises. Celui-ci envoie ce cadeau encombrant à son roi Manuel 1er. Peu après, le roi décide d’en faire don au Pape Léon X. Un Indien, Ocem, accompagne cet animal jamais vu en Europe dans toutes ses pérégrinations. Il raconte dans ce roman cette aventure extraordinaire.

 

Comment avez vous travaillé pour l’écrire ?

Quand j’ai découvert qu’un rhinocéros avait séjourné quelques jours sur l’îlot d’If en 1516 et reçu la visite de François 1er à son retour de Marignan, j’ai voulu en savoir davantage et j’ai mené une véritable enquête qui m’a conduit jusqu’au célèbre rhinocéros de Dürer. J’ai ensuite imaginé ce qu’avait pu être la vie d’Ocem, son gardien, dont on ne sait pratiquement rien. Il a existé, il a voyagé mais qui était-il vraiment ? Je lui ai donné la parole.

Vous avez eu recours à un coaching d’écriture : que vous a apporté ce travail  ?

Énormément ! Comme j’étais assez novice, j’ai écrit d’abord un récit cursif très naïf dont je n’étais pas franchement satisfait. J’ai donc eu recours à Marianne Jaeglé qui n’a pas ménagé ses critiques… Je les ai trouvées toutes très pertinentes. J’étais en partie déniaisé et j’ai repris mon texte : définir le moment de l’écriture par Ocem ; donner de l’épaisseur au héros et aux principaux personnages qu’il rencontre ; visualiser réellement les scènes principales pour mieux les décrire, les mettre en scène. C’est grâce à cette aide renouvelée et à ce travail que ce projet de roman a retenu l’attention de plusieurs éditeurs. En particulier Les Indes Savantes. Sa collection Le Cannibale convenait particulièrement à l’histoire.

 

pour l’acheter : http://livre.fnac.com/a10106484/Jean-Franc-Chambolle-Le-maitre-de-l-unicorne

 

« Le testament de Nicolas » – Bessora

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Le testament de Nicolas est un roman où nous suivons Nicolas, 17 ans, en quête d’idéal. Un peu comme Günter Grass, l’écrivain qui, dans les années 1930 s’engageait pour la Waffen SS, Nicolas, adolescent égaré, se fourvoie dans une brigade armée en Syrie.

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Nicolas est lycéen, en conflit avec ses parents, en rupture avec la société. Hanté par la peur de mourir, il cherche un sens à sa vie. C’est aussi pour domestiquer la mort qu’il part en Syrie, croyant pouvoir y établir un monde meilleur, le califat.

Sous forme d’un journal testamentaire, adressé à sa soeur Salomé, Nicolas raconte son quotidien, la vie dans sa brigade, mais aussi ses doutes et ses hésitations. Au fil des pages, nous assistons à la naissance d’un monstre. Mais pour être un monstre, il faut d’abord être humain.

Le testament de Nicolas est écrit sans jugement de valeur, ni langue de bois ou catéchisme. On voit Nicolas, on l’entend, on le suit dans sa quête, son désarroi et ses contradictions. Les camps d’entraînements, les émirs caressants, les camarades de combats, cet univers très masculin est transcrit avec réalisme. Ce roman est aussi une fable d’une grande puissance symbolique.

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Petroleum de Bessora, par le projet de recherche Ecolitt

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Doctorante en écocritique comparée à l’Université d’Angers, Anne-Laure Bonvalot publie un compte-rendu de lecture de Petroluem sur Ecolitt, le projet de recherche sur l’écologie en littérature de l’université d’Angers. Extrait

 

Source : Anne-Laure Bonvalot, « Petroleum », Ecolitt.


Véritable « pétro-polar », ce roman déroule de manière originale l’histoire pétrolière du Gabon : il est une enquête policière, politique et géologique qui explore tout à la fois les dessous de la terre et ceux de l’entreprise Elf-Gabon. Tout commence lorsqu’une explosion secoue l’Ocean liberator, une plateforme pétrolière au large de Port-Gentil – deuxième ville du pays – au moment précis où les géologues et autres foreurs accèdent enfin au liquide tant convoité. Les causes de l’accident sont méconnues, et leur élucidation constitue le cœur de l’intrigue. S’agit-il d’un attentat politique, d’une erreur de manutention, d’un sabotage de la part d’Étienne Girardet, un géologue syndicaliste et militant antiraciste qui périt dans l’explosion ? Pour tenter de démêler l’affaire, le siège parisien d’Elf envoie sur place un profiler aléatoire, Georges Montandon.

Les thèmes écologiques sont-ils centraux ou marginaux dans le texte ? Absolument centraux. Tout le roman peut être lu comme une histoire de l’exploitation des richesses naturelles du Gabon, en particulier du pétrole. La thématique de la profanation de la nature, évoquée notamment au travers de métaphores filées – viol répété de la terre – ou de récits mythiques et surnaturels – arbre d’Igoguino –, est profondément structurante. D’autres thèmes socio-environnementaux fondamentaux, comme la déforestation, la (non) gestion des déchets, la pollution, le racisme institutionnel, le paternalisme, la marchandisation à outrance du territoire et de ses ressources ou la brutalité du colonialisme sont traités sur un même plan, le texte abordant de front les problématiques politique, économique ou sociale et leur pendant écologique.

Les événements liés à l’écologie sont-ils réels ou imaginaires ? Plutôt réels : bien que le récit comporte une forte dimension surnaturelle, celle-ci n’a rien de vraiment fantastique puisqu’elle se fonde sur des légendes et des représentations de la nature locales et continentales. L’historique de l’extraction pétrolière se déroule en effet selon deux niveaux : d’une part, le récit des agissements des géologues, des cadres et autres employés de l’entreprise Elf-Gabon est jalonné de références précises à l’histoire de l’exploration du pétrole dans la région – dates du forage des premiers puits et des accords signés, chiffres de la production pétrolière, manœuvres internes à la compagnie – ; d’autre part, le récit de l’histoire des populations locales livre leurs cosmogonies particulières, mais aussi les modalités complexes de leurs relations souvent conflictuelles avec les premiers. Le roman est extrêmement bien documenté et se fonde ainsi sur un régime de référentialité réaliste.

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Paiement des droits d’auteur

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La loi Création, Architecture et Patrimoine du 7 juillet 2016 a permis d’intégrer au code de la propriété intellectuelle un nouvel article qui sanctionne l’absence de paiement des droits d’auteur par une résiliation de plein droit du contrat.


L’article L.132-17-3-1 du CPI précise désormais que l’éditeur doit procéder au paiement des droits au plus tard six mois après l’arrêté des comptes, sauf convention contraire, et que faute pour celui-ci de procéder au paiement dans ces délais, l’auteur peut, durant les douze mois qui suivent, mettre l’éditeur en demeure de régler ces droits d’auteur. Si cette mise en demeure n’est pas suivie d’effet dans un délai de trois mois, le contrat est résilié de plein droit.

D’une manière générale un éditeur arrête ses comptes chaque année au 31 décembre. Au moins une fois par an, il doit verser les droits d’auteur relatifs à l’exploitation des œuvres. La date de paiement est prévue au contrat. A défaut, le paiement doit intervenir au plus tard six mois après l’arrêté des comptes.

Article L .132-17-3-1 du Code de la propriété intellectuelle :

« L’éditeur procède au paiement des droits au plus tard six mois après l’arrêté des comptes, sauf convention contraire précisée par l’accord rendu obligatoire mentionné à l’article L. 132-17-8.

Si l’éditeur n’a pas satisfait à son obligation de paiement des droits dans les délais prévus au premier alinéa du présent article, l’auteur dispose d’un délai de douze mois pour mettre en demeure l’éditeur d’y procéder.

Lorsque cette mise en demeure n’est pas suivie d’effet dans un délai de trois mois, le contrat est résilié de plein droit.

IMPORTANT :

* Toute mise en demeure s’effectue par lettre recommandée avec accusé de réception. Conserver une copie de la lettre.

* La résiliation de plein droit est automatique. Si votre éditeur ne respecte pas ses obligations dans le délai de trois mois, le contrat sera résilié et ce, même si vous souhaitez poursuivre votre collaboration avec lui.

* Une fois la résiliation du contrat acquise, adresser une lettre simple à l’éditeur pour avoir un document à présenter à un éventuel futur éditeur justifiant des démarches. Si l’on souhaitez poursuivre sa collaboration avec l’ancien éditeur, signer un nouveau contrat d’édition.

 

 

Le Congrès Sharp

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Le congrès Sharp examinera, du 18 au 22 juillet 2016, l’histoire du livre et la culture de l’imprimé dans la République mondiale des lettres. 400 chercheurs venus des cinq continents s’interrogeront sur la circulation de l’imprimé sous toutes ses formes dans l’espace international selon les nations et les époques, sur le langage du livre en tant qu’objet. On analysera l’impact de la révolution numérique en tant que nouveau langage de l’imprimé.


SHARP (Society for the History of Authorship, Reading and Publishing) est une association internationale qui rassemble chercheurs, étudiants, professionnels et amateurs, autour de l’histoire du livre et de l’imprimé. Après Philadelphie, Anvers et Montréal, le 24ème congrès de SHARP se tiendra à Paris, à la Bibliothèque nationale de France et la BULAC (Bibliothèque universitaire des langues et des civilisations), du 18 au 21 juillet 2016. Ce congrès bilingue (français et anglais) a pour thème « Les langues du livre ». Il abordera des sujets tels que la circulation des imprimés dans le monde, les flux de traduction, les effets de la révolution numérique, les problèmes d’illettrisme.

Organisé conjointement par le Comité français international bibliothèques et documentation (CFIBD) et la Bibliothèque nationale de France (BnF), le congrès SHARP 2016 propose de nombreuses activités scientifiques : conférences plénières et tables rondes, ateliers, ateliers de doctorants, exposition de projets numériques etc. Il rassemblera quelque 400 chercheurs venus des cinq continents.

Alpha de Barroux et Bessora, par la revue Migrinter

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Doctorante en géographie, Sarah Przybyl publie un compte-rendu de lecture d’Alpha dans la revue e-Migrinter. LABORATOIRE MIGRINTER – UMR 7301 CNRS / Université de Poitiers. Extrait

 

Source : Sarah Przybyl, « Bessora ; Barroux, Alpha, Abidjan-Gare du Nord », e-Migrinter.


Les supports pour comprendre et analyser les migrations internationales se diversifient. Si le laboratoire MIGRINTER a fait du web un nouvel espace de valorisation de la recherche (photothèque, archives numérisées, réseaux sociaux, etc.), les rayons de son fonds documentaire ne cessent de s’étoffer et de se diversifier. Aux côtés des revues spécialisées, des atlas, des dictionnaires, une étagère accueille désormais des bandes dessinées. Ainsi, on retrouvera une adaptation du célèbre roman l’Étranger d’Albert Camus (Camus, Fernandez, 2013), ou encore l’histoire dessinée d’un « Beurgeois » (Boudjellal, 1997). Supports étonnants à première vue, ces ouvrages illustrés ont pourtant tous bel et bien un lien avec la thématique des migrations internationales. Ils permettent de lire et d’aborder ce sujet de manière différente.

L’histoire d’Alpha c’est celle d’un homme animé par le désir de retrouver sa femme et son fils. Le propos léger et parfois humoristique de Bessora rappelle que les migrations internationales sont avant tout des histoires humaines. Si les routes sont bien incertaines, la détermination de ces « aventuriers »1 reste intacte au cours de la lecture. Cette bande dessinée ce n’est pas seulement l’histoire d’Alpha que Bessora et Barroux donnent à voir et à lire ; c’est aussi celle de milliers d’autres hommes, de femmes et d’enfants prêts à tous les sacrifices pour rejoindre un ailleurs plus prometteur. La seule inconnue du voyage reste le sort que cet ailleurs leurs réservera une fois arrivé à destination, mais aussi et surtout : Alpha retrouvera-t-il enfin sa femme et son fils pour lesquels il a pris tant de risques ?

L’arrivée des bandes dessinées dans les rayons du fonds documentaire du laboratoire MIGRINTER confirme l’intérêt d’intégrer de nouveaux supports dans la compréhension des expériences migratoires. Considérés comme des outils d’expression par certains, comme des données de terrains de recherche à part entière par d’autres, la présence de ces œuvres réaffirme la pertinence de la diversification des sources d’analyse des flux migratoires dans le champ des migrations internationales.

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A day without celebrities

Source : http://liveart123.blogspot.com

Source : http://liveart123.blogspot.com

Ce billet d’humeur a été écrit par l’un de nos membres, un pudique qui souhaite garder l’anonymat. Reflet de l’état d’esprit de nombres d’entre nous, on se l’approprie d’autant mieux qu’il reflète l’état d’esprit de nombre d’entre nous.

Les temps sont durs, je suis horrifiée par ce que je lis tous les jours, les réfugiés qui se noient par milliers, les enfants bouffés par les chiens du voisin ou plongés dans l’eau bouillante par
leurs parents. Les atrocités commises, (l’autre jour un jeune homme écorché vif après s’être fait arracher les yeux puis balancer du haut d’une falaise), les jeunes filles brûlées vives par leur propre mère.

Il y a 75 ans on jetait les gens dans les fours, d’autres bouffaient leurs prisonniers de guerre, la Chine a affamé des millions de ses propres citoyens, des enfants esclaves fabriquent encore nos biens de consommation, et ailleurs des petits albinos sont dépecés à coups de hache pour le pouvoir de superstitieux de la pire espèce.

Il y a eu les droits de l’homme, les droits de la femme, les droits LGBT, la création d’institutions et d’ONG qui protègent, défendent. Les gens se mobilisent par millions pour signer des pétitions, mettre de la pression.

Des fois ça marche.

Mais ce n’est guère une consolation pour la famille d’une petit garçon mort sur une plage.

Je vais arrêter de lire les news pendant quelque temps. Ne serait-ce que pour échapper aux photos Instagram de toutes ces célébrités à la con qui me donnent envie de gerber. Si j’étais une Tweeteuse, je lancerais un mouvement intitulé A Day Without Celebrities

Parfois le Vide – Jean-Luc Raharimanana

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Le 17 juillet 2016, dans le cadre du festival d’Avignon, lecture musicale de Parfois le vide, de Jean-Luc Raharimanana, avec  Tao Ravao, Jean-Christophe Feldhandler, Geraldine Keller. Au jardin de la Rue de Mons, à 11h30.

Un personnage, entre les eaux et le ciel, parfois oiseau, souvent noyé/nageur. Il va vers, ou peut-être qu’il fuit… on dit qu’il migre.

Avec cette exclamation, ce salut, « Ça va, ça va le monde ! », RFI invite spectateurs et auditeurs à appréhender l’actualité du monde par les mots du théâtre. Pour la quatrième année, RFI propose un cycle de lecture de six textes d’auteurs contemporains francophones issus d’Afrique, du Proche-Orient et de l’Océan indien. Ces créations sont à entendre tous les matins dans le jardin de la rue de Mons puis sur les ondes de la radio mondiale au cours de l’été. Grâce à des auteurs confirmés ou à découvrir, avec le plus souvent des textes inédits, l’objectif est d’inviter les spectateurs et les auditeurs à croiser les imaginaires et à entendre d’autres histoires du monde. Le cycle « ça va, ça va le Monde ! » est coordonné par Pascal Paradou et dirigé par le metteur en scène Armel Roussel dont la compagnie (e)utopia3 participe à la production.

Ces lectures en public sont également diffusées sur les antennes de RFI à partir du 24 juillet : Fréquence Paris – 89 FM et sur rfi.fr

Distribution

Lu par Jean-Luc Raharimanana avec Tao Ravao (guitare), Jean-Christophe Feldhandler (percussion) et Géraldine Keller (chant)

Production

Coproduction le Festival d’Avignon
Avec le soutien de la SACD dans le cadre de son action culturelle radiophonique

 

« Vincent qu’on assassine », roman

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Vincent qu’on assassine est paru aux éditions  Gallimard (collection l’Arpenteur), en avril dernier. Auto-interview pour les ateliers d’écriture Elisabeth Bing


 

De quoi parle ce roman ? 

Il retrace les deux dernières années de la vie de Vincent Van Gogh. En juillet 2014, je suis tombée sur la biographie de ce peintre par les historiens américains Naifeh et White Smith. Ils y démontrent que, contrairement à ce qu’on croit depuis cent vingt ans, Vincent Van Gogh ne s’est pas suicidé. Il a été assassiné. J’ai immédiatement eu une sorte de révélation : bien que la biographie ait rétabli la vérité, tout restait à écrire. Les faits étaient là, mais leur signification véritable manquait toujours : seul le roman, parce qu’il restitue la réalité dans ses dimensions factuelles, mais aussi sensorielles et émotionnelles, pouvait rendre compte de ce qui s’était passé à ce moment-là.
Je connaissais, bien sûr, l’extraordinaire correspondance de Vincent Van Gogh. Mais en avançant dans mes recherches, j’ai pris conscience du fait que ses lettres, bien souvent, ne reflétent qu’une dimension très partielle et très subjective de la réalité. Si on les met en relation avec d’autres points de vue, (d’autres lettres, par exemple, ou une simple chronologie) cela saute aux yeux. Là encore, le roman était la forme la plus appropriée pour faire vivre cela, parce qu’il fait coexister des subjectivités différentes, il donne à voir le monde dans sa complexité.

 

Le résultat de ce travail est-il un roman policier ? 

vangoghNon ! Certes, le roman retrace la mort de Vincent Van Gogh, mais il montre surtout l’effort du peintre pour faire aboutir son travail de création et pour faire exister sa peinture dans un monde qui le nie en tant qu’artiste.
J’ai été frappée de constater combien pour cet homme que nous considérons aujourd’hui comme un génie incontestable, la peinture était un combat, un effort, une conquête.  » Qu’est-ce que dessiner ? C’est l’action de se frayer un passage à travers un mur de fer invisible qui semble se trouver entre ce que l’on sent et ce que l’on peut.  » De nombreux passages du roman ont été écrits à partir des notations et des réflexions sur le fait de créer dont la correspondance de Vincent Van Gogh est émaillée.
Il y a là pour moi une continuité évidente avec mon livre Ecrire de la page blanche à la publication et le film Tu veux écrire réalisé par Jean-Luc Cesco. Même s’il est question de peinture et non plus d’écriture, la question de la création reste centrale.

 

Quelle est la part de fiction ? 

Elle est mince. Je n’ai pas d’imagination, d’une part. D’autre part, comme mon roman prétend rétablir une vérité par rapport à quelque chose qui serait de l’ordre du mythe,  – le suicide- j’étais tenue de respecter au maximum les données historiques. J’ai donc écrit à partir des documents dont je disposais.
J’ai travaillé dans la direction que Marguerite Yourcenar indique avoir empruntée pour écrire les Mémoires d’Hadrien : « J’ai tâché de reconstituer tout cela, à partir des documents, mais en m’efforçant de les revivifier ; tant qu’on ne fait pas entrer toute sa propre intensité dans un document, il est mort, quel qu’il soit. » Je disposais de la correspondance, des tableaux, de données biographiques : tout un matériau d’une fabuleuse richesse, que je me suis employée à vivifier de mon mieux.
Certains tableaux, par exemple les Tournesols, le Portrait du docteur Rey, ou encore la Berceuse, ont une histoire extraordinaire, que ce soit à cause de ce qui les génère, du moment où ils sont peints, ou à cause du destin des toiles. Ils sont en eux-mêmes riches d’un potentiel narratif immense. Il n’était pas nécessaire d’ajouter quoi que ce soit : mon objectif en tant qu’auteur était d’utiliser au mieux ce magnifique matériau d’écriture, d’en rendre compte avec la plus grande justesse possible.

 

Les Ateliers d’écriture Elisabeth Bing