L’European Documentary Network

EDN


L’European Documentary Network (EDN), est une organisation internationale. Elle informe les professionnels du documentaire, sur les possibilités de financement et de production en Europe. Paul Pauwels la dirige depuis 2013. Un entretien réalisé par la SCAM, par Anne-Lise CARLO.


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Anne-Lise CARLO

L’ European Documentary network fête cette année ses vingt années d’existence. son rôle a-t-il beaucoup évolué durant cette période ?

Paul PAUWELS

Il y a plus de deux décennies, un petit groupe de professionnels européens du documentaire réunis alors à Marseille, a souligné la nécessité évidente de créer une organisation qui défendrait les intérêts de la communauté documentaire tout en étant un réseau professionnel de partage de connaissances et d’informations. Parti de rien, ce groupe n’a cessé de croître ensuite en nombre de membres. Au sein même de eDn, une équipe très motivée a réussi, au fil des ans, à construire ce relais solide du secteur documentaire. Je poursuis aujourd’hui cette mission initiale qui, bien sûr, s’est enrichie en fonction des besoins du secteur.

Comment votre réseau s’est-il mis en place concrètement ?

 

Paul-Pauwels_01eDn est né en disant au monde du documentaire : « nous pouvons vous aider ! ». or les gens à qui s’adressait eDn travaillaient jusque-là chez eux, dans leur propre cuisine avec une chaise et une table. C’est souvent ainsi que l’on produisait un documentaire à l’époque. Mais peu à peu, les expertises se sont améliorées, le monde du documentaire est devenu plus exigeant et les budgets ont dans le même temps augmenté. En face, il y avait aussi davantage de clients parce que la télévision publique voulait soudainement des programmes différents pour se défendre vis-à-vis de la télévision privée. Mais le professionnalisme n’était pas encore à la hauteur des besoins. C’est dans ce but que sont nées nos sessions de pitch de projets. Au tout début, les ateliers se tenaient à Copenhague car je dois rappeler que eDn existe grâce au Danemark. Le Danish Film Institute et le ministère de la Culture danois nous ont soutenus dès le départ pour pouvoir lancer notre initiative. Peu à peu, des ateliers se sont aussi organisés avec le soutien de partenaires locaux en Italie, en Espagne, au Portugal, en France, en Hollande… Cela a contribué au développement professionnel du secteur du documentaire. Danscertains pays, nous avons dû aussi travailler au niveau national : en Italie, au Royaume-Uni, en Écosse, au Portugal il n’y avait pas d’associations professionnelles de documentaristes. Après la chute du Mur de Berlin, une grande partie de notre travail a été réalisée en Europe de l’est. Dans ces pays, les gens nous disaient sans cesse : « Personne ne s’intéresse à nos histoires, nous ne pourrons pas trouver d’aide Europe…
». Il a fallu les convaincre du contraire et leur donner confiance. L’Institute for Documentary Film à Prague, le Balkan Documentary Center à sofia, qui ont beaucoup de succès à présent, sont réellement des enfants de eDn
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Les ateliers de pitching coorganisés par edn ont lieu notamment à Lisbon Docs ou à Docs in Thessaloniki. Avec la professionnalisation avancée du documentaire, sont-ils toujours d’actualité ?

 

Plus que jamais! Lorsque l’on a commencé à faire ces sessions, Il y a vingt ans, tout le monde était un héros, un génie. On disait: « tout le monde va vous aider et vous allez trouver de l’aide internationale» et c’était le cas. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus difficile. C’est pourquoi nous faisons une première sélection très stricte des projets qui nous sont proposés. Pour un atelier comme celui de Lisbonne, nous recevons au départ cent à cent dix propositions et nous pouvons en choisir seulement vingt. Nous essayons de mixer les projets venant

de différents pays et des réalisateurs avec des expériences différentes. Des collaborations naissent souvent ensuite de ces échanges.

À Lisbonne, il y a en général au moins quatre projets de films qui déjà trouvent des coproducteurs. C’est très important parce que cela aide à la construction d’un monde professionnel et européen du documentaire face à un Netflix par exemple.

Lorsqu’un producteur belge travaille avec un producteur polonais sur un projet polonais, nous défendons concrètement la diversité européenne. De plus, les pays d’Europe de l’est ont tellement d’histoires intéressantes à raconter et le fait que ce soit justement un producteur belge qui permette de faire émerger une de ces histoires, je trouve cela particulièrement intéressant.

Dans ces ateliers, je dis toujours aussi aux gens: « ne vous méprenez pas vis-à-vis des gens que vous avez en face de vous dans les forums. Ce ne sont plus eux qui prennent la décision finale d’acheter ou pas votre projet. Dépêchés par les chaînes télé, ils deviennent ensuite vos avocats car ils doivent ensuite pitcher eux-mêmes votre projet devant toute leur hiérarchie et le département financier. Et au minimum six ou huit mois après, avec un peu de chance, ils reçoivent le feu vert pour votre film ».

Catherine Le Goff ou Thierry Garrel chez Arte ont toujours fait des choix judicieux, sans crainte de prendre des risques. À présent, les chargés de programmes sont très peureux. Il n’y a guère que Mette Hoffmann Meyer de la télévision danoise qui continue d’imposer son audace mais elle sera bientôt, elle aussi, partie.

En fait, vous parlez vous aussi à un dinosaure ! J’ai été moi- même producteur de la fin des années quatre-vingt à 2004, date à laquelle j’ai vendu ma société car je tirais déjà un bilan assez négatif des changements dans le paysage audiovisuel. Mais jusque-là, j’ai vécu une époque dorée du documentaire. J’ai été ensuite pendant deux ans chargé de programmes pour la télévision publique flamande VRT.

Ce fut les deux années les plus misérables de ma vie mais j’ai appris énormément des processus de décision dans une chaîne de télévision. Aujourd’hui, en 2016, je vois encore de très bons producteurs raccrocher, épuisés par ces combats pour défendre le documentaire, et cela m’attriste…

 

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Suite de l’entretien sur le site de la SCAM

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